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Babelio : un entretien avec Pierre Frémeaux

Pierre Frémeaux dirigeant la société Babelio a bien voulu répondre à quelques questions.

Quelle est l’idée qui est à la genèse du projet Babelio ?

A partir du milieu des années 2000, internet a connu une mutation technologique et sociologique importante, de média de consultation qu’il était, il devient un média de participation. Très vite nous avons pensé que cela ouvrait une opportunité pour transférer le bouche à oreille sur internet, notamment pour la recommandation et l’échange de lectures. Parallèlement, la bibliothèque personnelle est un élément d’identité culturelle très fort, tous les grands lecteurs savent cela : quand on est invité pour la première fois chez quelqu’un on scrute sa bibliothèque et on devine des possibilités de partage, on découvre des oeuvres qu’on aimerait lire, qu’on a lu, qu’on ignore totalement etc. Babelio est un peu né à la croisée de ces deux sujets : le réseau social et la bibliothèque personnelle. Le site est ainsi devenu tout à la fois un outil pour créer des listes de lecture – une bibliothèque virtuelle en quelque sorte – et un outil pour partager des lectures, des avis, des extraits, des suggestions etc.

Quel est aujourd’hui le modèle économique de Babelio et ses limites ?

Le modèle est double :

  1. offrir aux éditeurs une caisse de résonance pour la sortie de leurs nouveautés, c’est un outil de promotion qui passe par des formats classiques (la publicité sous plusieurs formats possibles) ou interactifs (jeux concours, jurys littéraires en ligne, services de presse en ligne où des titres sont envoyés à des chroniqueurs en l’échange d’une chronique)
  2. offrir des outils de recommandation aux bibliothèques (notre service babeltheque.com) : Les usagers des bibliothèques sont en demande de recommandation et de conseil. Aujourd’hui la seule information différenciante dont dispose un usager cherchant un titre dans un OPAC, c’est – à peu de choses près – la disponibilité. Notre service permet d’enrichir les notices bibliographiques avec tout le savoir-faire de notre communauté de passionnés et de nos outils technologiques, parfois très complexes. On retrouvera ainsi sur une notice de bibliothèque : des avis d’internautes, des critiques de professionnels, des chroniques de presse, des extraits de l’œuvre, des nuages de mots clés d’indexation, des suggestions de lecture, des vidéos d’auteur etc. Tout cela permet d’enrichir l’expérience de l’usager dans l’OPAC et de favoriser les emprunts en bibliothèque.

Une limite du modèle économique peut être : comme le disait http://bibliotheque20.wordpress.com/ « On n’avancera pas en attendant l’outil parfait. On avancera en participant de l’élan : en faisant des trucs, ou en sponsorisant des trucs à potentiel » . Il y a quelques années, certaines bibliothèques étaient réticentes à ces services car ils souhaitaient que ce soient les participations de LEURS usagers qui alimentent l’OPAC : nous avons tenté d’expliquer à plusieurs reprises qu’une communauté ne se créait pas par l’adjonction de fonctions sociales et que notre métier était justement d’enrichir les catalogues de notre expérience en ce domaine. Aujourd’hui ce débat est tranché, comme l’a noté récemment Bibliobsession ici « les catalogues de bibliothèque ne seront pas massivement participatifs« , pendant ce temps les catalogues n’ont pas de services de recommandation et c’est surtout, outre notre produit, l’usager qui en pâtit.

Où en est l’action entreprise en termes statistiques ?

Nous sommes très transparents en terme de statistiques, vous pourrez ainsi retrouver tout cela sur le site. Aujourd’hui Babelio est la toute première communauté de lecteurs, nous réunissons

  • 500 000 visiteurs chaque mois et 38 000 membres inscrits, qui ont contribué en ajoutant
  • 86 113 citations et extraits choisis- 135 496 critiques et avis de lecteurs et professionnels
  • 1 637 521 livres catalogués
  • 1 826 571 tags d’indexation
  • 36 668 vidéos d’auteurs
  • 46 649 biographies d’auteurs

Quels sont vos projets pour la prochaine année ?

Ils sont nombreux, nous avons des fonctionnalités à apporter au site, qui seront transférées également sur Babeltheque. Nous pensons notamment, maintenant que la communauté s’est élargie, à améliorer les fonctions de distinction par genre littéraire. Par ailleurs nous avons travaillé avec des partenaires externes pour agréger du contenu (40 sources de critiques de presse, des vidéos issues de l’INA ou des sites de partage etc.), c’est aussi un sujet que nous allons creuser, afin d’enrichir la base de données.

Quel type d’offre avez-vous développé pour les bibliothèques ? et quelles relations entretenez-vous avec ces/les bibliothèques (Toulouse, San Ouest Provence, etc.) ?

Babelthèque est l’offre évoquée ci-dessus d’enrichissement du catalogue, qui s’intègre aux OPAC par un simple webservice. Un point peut être à préciser : aujourd’hui Babelthèque offre à la fois du contenu (critiques d’internautes et de professionnels, chroniques de presse, extraits, vidéos, etc.), des services (outil de contribution dans l’OPAC, modération des contenus par nos soins etc.) et des technologies. Sur ce dernier point en particulier nous avons passé beaucoup de temps à raffiner notre moteur de recommandation de lecture (qui permet de dire à l’usager « Si ce livre vous plaît la bibliothèque vous recommande également tel ou tel autre présents dans le catalogue« ), qui est un problème très complexe. En outre nous avons fait de nombreux traitements algorithmiques, documentaires ou sémantiques pour filtrer les mots clés d’indexation (cf : http://www.scribd.com/doc/37162752/L%E2%80%99indexation-communautaire-en-bibliotheque).

En terme de relation, que dire? Pascal Krajewski à Toulouse a joué un rôle très important dans l’établissement de ce projet (je crois qu’on peut dire que Babeltheque ne serait probablement pas né sans lui). C’est effectivement Toulouse qui est venu nous voir alors que nous connaissions très mal le monde des bibliothèques publiques, et a eu l’idée tout en conservant beaucoup de pragmatisme opérationnel : de fait le premier produit est né extrêmement vite de cette collaboration. Ensuite nous sommes évidemment en contact avec l’ensemble des bibliothèques qui nous font des retours pour améliorer le produit.

Cette entreprise produit des services communautaires et participatifs de qualité à destination des e-lecteurs et désormais son offre pour les bibliothèques commence à s’implanter. Elle est complémentaire des possibilités techniques offertes par les OPAC enrichis dont les bibliothécaires ne se saisissent pas systématiquement.

La Bibliothèque publique d’Ottawa se met aux mobiles

La Bibliothèque Publique d’Ottawa a développé une gamme complète d’applications pour mobiles et tablettes afin de donner accès sur ces outils nomade à tous les services qu’elle propose, notamment son catalogue en ligne et son site internet. Ces applications se répandent dans toutes les bibliothèques nord américaines. En France, en revanche, peu d’établissements de lecture publique ont franchi ce pas. La première bibliothèque a avoir développé une application sur mobile est la BMVR de Toulouse ; elle sera suivie dans peu de temps par les médiathèques du San Ouest Provence qui ont développé une application pour la catalogue Koha et qui en feront bénéficier la communauté des utilisateurs.

Ces outils demeurent donc encore peu répandus en France alors même que les possesseurs de Smartphones ont de plus en plus nombreux.